Je ne vais pas vous faire l’outrage de décrire la place de Charles De Coster. Ce demi-Flamand, né à Munich, formé, comme moi-même, à la libre pensée à l’Université Libre de Bruxelles (« libre » en Belgique ne veux PAS dire catholique, à l’inverse de la France) peut à plus d’un titre revendiquer le mérite d’avoir fondé la littérature francophone belge. Il est enterré au cimetière d’Ixelles, comme mon grand-père paternel. Bon d’accord, on visite moins son tombeau que celui de Jim Morrisson ou de Dalida.
Il a adapté une vieille légende allemande au folklore d’un village proche de Bruges, Damme - où un restaurant un peu surfait mais de qualité néanmoins (Le Siphon) vous prépare des anguilles au vert sensationnelles, soit dit en passant. Il s’agit de « La légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au pays de Flandre et ailleurs ». Sa lecture, parfois savoureuse et truculente, bourguignonne et rabelaisienne, présente néanmoins quelques longueurs. L’ouvrage me fait d’ailleurs penser – je ne sais pourquoi car les souffles sont différents – au « Don Quixotte » ..., les longueurs sans doute.
Voilà maintenant l’épisode auquel je fais allusion.
Un soir que Claes le charbonnier et Soetkin, sa moitié, se chauffaient près de l’âtre, les soldats espagnols (tiens, comme en Euskaldi) vinrent l’appréhender pour hérésie. Après que le bûcher des Habsbourgs eût refroidi, Soetkin et Tyl (son fils) recueillirent une bourse de cendres du pauvre homme et, à chaque moment important de son destin, Tyl devait répéter par la suite : « Les cendres de Claes battent sur ma poitrine (ou sur mon coeur, suivant les versions) ».
Il en fut ainsi également « alors que fumait sur les bûchers la graisse de Flandre » et qu’il voulait « sauver la terre de Flandre ». Ce profond sentiment – NB : non pas « national » mais réellement régional et d’appartenance tribale, populaire - tout Flamand le ressent envers l’occupant au cours de notre histoire: qu’il fût espagnol, autrichien, français, bourguignon et même romain, nous nous disons « Smijt hem buiten » - fous le dehors ! Le pire, ce sont évidemment les Hollandais.
Samia : tu penses que je n’ai pas oublié notre rencontre à Paris ... ni les suivantes ! Si j’ai fait semblant de ne pas te connaître, c’était une « Feingteu » - comme dit Christine - de peur qu’Antonin ne prenne ombrage de notre complicité. Je pense que les vins du Domaine de la Coume Majou présentent les mêmes caractéristiques que ma cuisine : une bonne matière première, pas de recettes compliquées, beaucoup de temps et d’attention (dedication, disent les Britanniques) et ... une grande fierté au bout du compte, toute honte bue.